Un peu de religion avant d'aller chez le dentiste
Dimanche 5 mai 2013
En voyage, je suis toujours réveillé extrêmement tôt. Aussi à 6h48, quittai-je Mozart et son marathon pour gagner St Polten dans un premier temps. Mon train n'est pas celui de la compagnie nationale ÖBB mais celui de la Westbahn. L'intérieur est tout confort, l'extérieur sur 2 étages, moderne et profilé. Malgré une allure rapide, je passe à deux doigts d'une correspondance ratée : sur mes 7 minutes de transit prévues, je n'en ai réellement que 2. Le marathon se fait sprint.
Je rebrousse alors chemin pour revenir sur Melk et son abbaye inscrite au Patrimoine Mondial de l'UNESCO depuis 2000. Cet édifice est perché sur un éperon rocheux qui domine le Danube. Une longue construction blanche ainsi qu'une église jaune à coupole et 2 tours bornent ainsi mon horizon.
Pour y accéder, je laisse les maisons bourgeoises autour de la gare, descends dans une cuvette naturelle pour rejoindre le centre-ville et sa place centrale puis grimpe un petit escalier vers le sanctuaire.
Sur son seuil, je suis écrasé par l'ampleur de l'édifice qui contraste avec sa sobriété.
Contre 1€, je me débarrasse de mon sac le temps de la visite. 20kg en moins, une sacrée charge !
Deux cours intérieures se succèdent, la seconde étant nettement plus vaste et agrémentée d'une fontaine. Au bout, sur la gauche de celle-ci, une allée extérieure à arcades de 200 mètres de long.
Le début de la visite est là, au premier étage. Les deux ailes et l'église au centre constituent les trois temps du parcours. Je commence par l'aile opposée au Danube, celle qui me barrait l'horizon vue d'en bas. La galerie de 200m, dite "Galerie de l'Empereur", distribue sur de multiples salles où sont présentés tableaux et ouvrages religieux, objets liturgiques, la règle de St Benoit et les incontournables poêles en faïence de l'Europe Centrale. A son extrémité, une pièce magnifique, la salle de Marbre, au plafond peint en l'honneur de divinités de la mythologie grecque.
L'autre aile ne donne accès qu'à une poignée de pièces mais qui sont des plus remarquables ! Je commence par la bibliothèque qui peut tenir la comparaison (toutes proportions gardées) avec celles de Vienne et de Dublin : 100 000 volumes dont on ne voit qu'une fraction, des étagères du sol au plafond où reposent des ouvrages pluri centenaires, un globe-terrestre du monde vers 1600 et un céleste des principales constellations par hémisphère. Un gardien me précise qu'elle tient sur 3 étages alors que je n'en vois que deux pièces.
A son débouché, un escalier en colimaçon dont les spirales me conduisent à l'intérieur de l'église de style baroque. Comme une messe s'y tient, je n'ai pas totale liberté de mouvements pour aller à mon gré. Je puis cependant affirmer que l'or est omniprésent et presque éblouissant, que la statuaire comme les autels latéraux renforcent cette impression de richesse à l'instar du plafond couvert de fresques. J'en ressors le souffle coupé.
Pour finir, direction le jardin dont la visite est comprise dans le ticket d'entrée contrairement aux indications d'Internet. A cette saison, son intérêt est relatif du point de vue floral. Une rotonde rose bonbon transformée en café vaut le coup d'oeil pour les fresques sur ses murs et ses plafonds. Le chemin traverse ensuite un petit bosquet et s'achève par un carré de plantes médicinales.
Je regagne alors la voie ferrée pour me rendre à nouveau à St Polten -troisième passage sur ce tronçon- et de là, à Vienne Westbahnhof. Cette ville n'est pas à mon programme car j'y suis déjà venu en 2007 lors de mon premier séjour en Europe Centrale. Aujourd'hui, je ne m'y rends que pour mieux en repartir, en l'occurrence en rejoignant à pied une seconde gare : Meidling. Aucun intérêt en chemin : seulement des échoppes et des immeubles encadrant d'abord le tramway puis une rivière. Des journaux sont en vente libre-service dans des pochettes transparentes cadenassées aux panneaux de signalisation et qui ne s'ouvrent qu'à l'introduction de monnaie.
Je pensais mettre une heure entre les deux gares. Ca ne va me nécessiter en réalité que 40 minutes. Je peux ainsi prendre le train précédent celui que j'escomptais. Une correspondance à Wiener Neustadt et je repars dans une automotrice pour mon troisième pays en deux jours. Sopron, ville frontalière dans une langue de terre hongroise en territoire autrichien, m'accueille l'espace d'une visite. Je l'ai inscrite à mon itinéraire car elle apparaît parfois sous le terme de "Petite Prague" et que la capitale tchèque est une des plus belles cités que j'ai vues en Europe. Sur place, cette comparaison s'avère un brin flatteuse : un petit centre chaleureux, bariolé de couleurs de tous les tons, mais dont la peinture des façades tend à s'écailler par endroits en l'absence de ravalement. La partie historique est ceinte derrière une muraille parfois apparente.
Elle vaut principalement pour sa place principale avec l'Hôtel de Ville, une tour-horloge, une église et une colonne nuageuse.
Pour terminer je passe devant les lieux de culte catholique et juif aux styles des plus éclectiques.
Une curiosité interpelle en revanche : dans nombre de devantures, une affichette blanche remplie de photos de jeunes gens qui ne doivent plus l'être, en blouse blanche. Il s'agit de cabinets de dentistes, Sopron attirant surtout un tourisme médical orienté sur la rénovation de "façades" justement.
Drôle de ville qui embellit les gens d'ailleurs mais oublie d'entretenir son patrimoine local ...
Quittant Sopron, je fais ainsi bénéficier des touristes qui ont raté leur train pour Vienne de mon expérience sur cet itinéraire et des solutions alternatives qui s'offrent à elles. Je referme cette parenthèse magyare en me dirigeant sur Graz via Wiener Neustadt. Journée de rebroussements de parcours décidément ...
Dernier train du jour : un Eurocity pour Zagreb, une ville où je ne passerai que dans 36h environ. A bord, le confort est plus conséquent que dans l'automotrice, notamment au niveau sonore. Les passagers se répartissent dans des compartiments de 6 places. Je fais ainsi la connaissance de Karl, biologiste dont le travail consiste à implémenter sur des robots des algorithmes reproduisant les comportements des animaux. Oeuvrant sur un prototype avec d'autres laboratoires européens, il n'est pas capable de me préciser la finalité de ses travaux qui sont expérimentaux. Peu importe, je me cultive. La conversation dévie doucement sur mon voyage alors qu'à travers les baies vitrées défilent des panoramas splendides de montagnes enneigées que le train gravit en serpentant. J'en profite pour qu'il évoque Graz, la ville où il vit. Au terme du trajet, il me tend une carte de visite avec ses coordonnées "au cas où". Ca c'est de l'hospitalité !
Comme hier soir, parvenu à destination il commence à pleuvoir. Il ne faudrait pas que ça devienne une habitude... En outre, les travaux du tramway me compliquent fortement la tâche pour retrouver mon auberge de jeunesse. Une fois sur place après quelques errements, j'apprends que j'ai la chance d'être seul dans une chambre de 4 avec salle de bain et WC privés. Un véritable luxe ! La soirée passe trop rapidement entre le repas, la préparation du lendemain, le carnet de voyage et le récit à mes proches.